Marc Rothko
Marc
Rothko
La
réalité de l’artiste, Éditions Flammarion, Paris, 2004
Sur
l’image que projette l’artiste et son mythe : « Ce mythe, comme tous
les mythes, a maint fondement raisonnable. Pour commencer, il témoigne de la
croyance courante aux lois de la compensation : sensibilité d’un sens
gagnera à la déficience de l’autre. Homère était aveugle, et Beethoven sourd.
(…) Mais surtout il atteste la croyance persistante dans le caractère
irrationnel de l’inspiration, trouvant entre innocence enfantine et les
dérangements de la folie cette intuition vraie qui n’est pas accordée à l’homme
ordinaire. » (p. 52) Lire La folie de l’artiste de Thierry Delcourt.
« Étrange, mais l’artiste n’a jamais fait tout un plat de se voir refuser
ces estimables vertus[1] dont les autres hommes
ne voudraient pas se passer : intellectualité, sûreté de jugement,
connaissance du monde et conduite rationnelle. On peut même l’accuser d’avoir
cultivé le mythe. » (idem) !!! Oui ! C’est vrai, en partie… Ou
ce sont les autres qui cultivent ce mythe ?
« La
liberté de mourir de faim ! Quel paradoxe ! Mais ne riez pas. Ne
sous-estimez pas le privilège. » (p. 55)
« Ce
n’est point là un appel à la compassion. L’artiste a accepté son destin les
yeux ouverts, et je ne crois pas qu’il souhaite quelque aumône en rapport avec
le sacrifice qu’il a librement consenti. » (p. 60)
« Quand
l’artiste produit quelque chose qui n’est intelligible que pour lui, il a déjà
apporté une contribution a lui-même en tant qu’individu, et par cet effet a
déjà contribué au monde social (tout comme nous profitons, et profitons à la
société, quand nous mangeons). » (p. 65)
« Les
hommes, on l’a vu, tiennent à la production artistique comme à
l’accomplissement de la nécessité biologique de s’exprimer. L’art est l’une des
voies qui a offert des moyens satisfaisants – ce que nous pouvons appeler ici un
langage – pour assouvir avec succès ce besoin. » (p. 73)
« Un
tableau est l’énoncé par l’artiste de ses notions de la réalité dans les termes
du discours plastique. En ce sens, c’est au philosophe, plutôt qu’à l’homme de
science, qu’il faut comparer le peintre. Car la science est l’énoncé des lois
qui gouvernent un phénomène scientifique ou une catégorie de matière ou
d’énergie dans les limites et conditions spécifiées de ses opérations ; la
philosophie doit cependant mêler toutes ces vérités spécialisées au sein d’un
seul système. (…) …tout homme, sauf le
philosophe, est une autorité au sein de son domaine spécifique (…) »
(p. 177)
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