Bon, les nouvelles du jour.
Je ne réussis toujours pas de réaliser les entretiens, mais, aujourd'hui j'ai eu une sorte de préliminaire. Complètement à-méthodologique. Mais, des fois la situation se prête… et là, on fait avec.
Il y a un moment je me demandais sur mon "échantillon" et au-delà de la problématique de choix des sujets il y a cette première division: homme/femme. Y a-t-il des différences? Oui. Et non. Mais maintenant (circonstances aidant) je n'ai que des femmes. Ce 8 mars on a une exposition collective "10 femmes pour 10 mots" liant le jour international des femmes (sic!) au mois de la francophonie. En principe, cette idée de division par genre me déplait, me dérange. Il y a toujours ce discours de "femme-artiste", "comment le vis tu?", "comment c'est", "comment peux-tu concilier maternité et création? (comprendre: création et création)", etc. Donc, du coup, j'élabore déjà un projet de recherche et d'exposition avec les mêmes principes, mais en remplaçant "femme" par "homme" - ça sonne si ridicule! C'est pas normal. Mais, en laissant de côté les questions de genre et de discrimination, le travail collectif pour cette exposition m'a permis un rapprochement avec des artistes que je ne connaissais que de nom et d'oeuvre. Et aujourd'hui en surveillant que l'institution qui organise l'expo fasse le travail qu'elle doit faire (nous donner la salle blanche et pas noire comme ils le veulent) j'ai approché une collègue en lui demandant un entretien. Je dis "entretien" puisque c'est la traduction de l'espagnol et   pour situer la conversation dans le cadre de mes études. Voilà, proposition faite et acceptée, elle commence à raconter. Comme un déclic "c'est très intéressant et je vais te raconter comment suis-je devenue artiste parce que c'est ça qui a marqué ma manière de travailler et d'approcher le processus créatif." Donc, du coup, la demande c'est transformé en entretien et je n'ai pas enregistré pour ne pas couper cette spontanéité. Je vais rapporter son discours et son histoire de mémoire, sous forme de discours rapporté.
P.B. est la fille d'un artiste local très connu donc elle a grandi dans une ambiance artistique: atelier(s), expositions, maison. Elle ne voulait pas suivre les pas de son père par peur et timidité. En effet c'est la confrontation avec le public et avec la qualité de l'oeuvre qui l'a fait se décider pour des études en design graphique. La création elle l'a approché après ses études et dans sa vie professionnelle./ Elle c'est approché de la gravure pendant ses études mais en tant qu'outil de réproduction. Donc, elle connaissait cette technique mais sans l'avoir utilisé à des fins artistiques. Ce que fait qu'elle commence à fréquenter des ateliers d'artistes graveurs et suit une première  exposition où elle a du succès. De là… design abandonné presque complètement (cette deuxième profession (devenue deuxième) est gardée en tant que job rentable) pour devenir finalement artiste.
L'intéressant: comment les gens s'ouvrent dans une conversation. Et comment je reviens vers mon idée de artistes-femmes, artistes-hommes: la maternité. Et comment cette question de maternité (re)définit la création en général et le pourquoi de la création. Elle n'a pas eu d'enfant et il y a eu une période assez longue dans sa vie où elle s'est demandée sur le sens et le pourquoi de son art. Finalement on crée pour quelqu'un. On commence par un besoin interne d'autosatisfaction (de quoi? du sur-moi? du désir?) mais puis il y a un public et aussi un héritage… Un artiste vit aussi dans un sens d'historicité, on veut léguer à la descendance, à l'humanité… Du coup la conversation a tourné vers ces thèmes qui n'affectent pas tellement les hommes. Rilke (je crois, et de mémoire) disait que la création n'est pas donnée aux femmes puisqu'elles enfantent, créent naturellement… Ainsi, on a des hommes, des femmes à enfant, des femmes sans enfant… Dans le cas des femmes, cette question de la maternité est très importante car la vie psychique du sujet affecte toute sa production et création (Frida Kahlo est l'exemple le plus utilisé). Mais je ne sais pas comment intégrer ça. C'est important puisque P.B. a parlé spontanément du sujet ce que veut dire que c'est un sujet qui est toujours présent chez elle… Mais, artistes-femmes qui ont une famille et des enfants? Elles ont d'autres problèmes. Le phénomène le plus courant c'est l'abandon de l'art (malheureusement): raisons économiques (l'art, le plus souvent ne rapporte pas), raisons… euh… le mari n'aime pas (ça existe, et souvent) ou, plus simplement, le fait de créer vie est finalement plus important que le fait de créer des objets.
Puis, P.B. sur comment a changé son travail dans l'atelier avec le temps. La différence entre ses années de jeunesse et maintenant. Le maintenant est toujours en relation avec le temps et sa perte; "Je ne me permets plus de perdre du temps comme avant. Quand j'étais jeune je passais beaucoup de temps dans mon atelier à ne rien faire ou à lire ou je travaillais frénétiquement croquis après croquis." Maintenant elle raconte une méthode, un processus de travail plus méthodique, plus direct. A faire l'oeuvre directement sans perdre du temps. Mon hypothèse derrière ces mots: c'est l'expérience au sens de pratique.  Après vingt ou trente ans de travail on se fait des raccourcis et des automatismes. On sait aussi qu'est-ce  qu'on veut faire et on sait comment. Ça sonne souvent à recette, mais l'artiste a appris qui est-il dans son art (on ne change pas de style radicalement quand on a déjà une carrière et on est connu pour… paysagiste par exemple: virer vers l'abstrait c'est une sorte de suicide. On peut arrêter par contre). C'est une sorte d'auto-affirmation qui a parcouru un très long chemin d'autoformation.
Voilà, entretien pas fait (je la visiterais aujourd'hui ou demain pour le faire pour de vrai) mais, déjà, j'ai eu une conversation très intéressante.
Et je crois que j'aurais beaucoup plus que deux entretiens. Je suis très curieuse et les personnes à qui j'ai demandé semblent très intéressés et ouverts.
Je mets ce récit-discours  rapporté en annexe?
P.S. Entre autres j'ai commencé à "enseigner" sur les bienfaits du diarisme! Une amie (artiste aussi) qui essaye d'écrire un article et n'arrive pas à le finir se plaint. La réponse? Tiens un journal de recherche ou, plus simplement, de tes idées! Le travail, les enfants ne te laissent pas concentrer devant ton ordinateur ? Tiens un journal, peu importe comment (je blogue) l'important c'est de ne pas perdre ces idées et, puis, se relire. Là, le travail prend forme.

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