Pour moi, le non achèvement d'un journal signifie tout simplement que je n'ai pas réussi de traiter le thème qui m'intéresse le plus. J'ai fait des détours. Pourquoi? Parce que le voyage de quel je veux parler c'est le trip. Oui, c'est le bon mot.
Alors, le trip c'est selon le dictionnaire de la CNRTL c'est :
"1. Arg. de la drogue. État particulier résultant de l'absorption de certaines drogues, notamment le L.S.D., qui entraîne des dérèglements psychiques et des troubles de la conscience (perte des réalités, euphorie, hallucinations, etc.).
Je peux affirmer que quand on est en pleine création, il y a trouble de la conscience, de la réalité, euphorie, etc. J'ai toujours comparé cela à un état de transe… Je ne sais pas ce que je fais. Enfin, oui, je le sais, j'ai des années de pratique et connaissances automatisées qui me permettent ne pas rationaliser la peinture. Elle doit doit se frayer chemin vers la surface, se matérialiser sur la toile sans que le côté cérébral intervienne. Je ferais mal laisser comprendre que tout est coeur, esprit, inconscient, etc. notre cerveau est merveilleux et est capable de fonctionner des manières très inattendues.  Le cas des peintres abstraits et ceux des musiciens (surtout eux!) me semble des plus parlant: on fonctionne à un niveau au-delà du langage - à travers des sons ou des images… Avant, je rêvais souvent des rêves abstraits et en blanc et noir: des formes mouvantes et texturées, presque palpables et goûtables aussi qui impliqueraient tous les sens. Michaux s'approche vers une description semblable dans son miracle et, même lui, écrivain, maitre et seigneur de la parole ne réussit pas de décrire les états vécus.
Donc, il y a l'indicible qui nous attrape et cet autre langage, le alter est souvent plus parlant.
Mes rêves, je ne les fais plus: j'ai trouvé, il me semble, la manière de les matérialiser. Et d'aller même vers l'extreme de la non rationalisation. D'abord, le matériel, j'ai trouvé mon support blanc qui supporte tout - blanc plastique qui prend une autre tonalité une fois creusé. Il prend profondeur juste en lui donnant du relief. Du contre-relief plutôt. Et puis, en étant une planche de PVC, poly(chlorure de vinyle), elle supporte tout! Il ne s'agit plus de la peinture classique, c'est du feu, de la poudre à canon qui permet un trip réel, du type auto-induit. Ainsi, mes connaissances, mon savoir-faire sont utilisées après-coup (après explosion) et ce que compte c'est justement cette séparation entre un monde réel et un monde imaginaire. Qu'on ne peut pas expliquer. 
Bataille, dans son "Expérience intérieure" tente d'expliquer un peu l'indicible et son importance, sur l'impuissance des mots: 
"nous cherchons à saisir en nous ce qui subsiste à l'abri des servilités verbales et, ce que nous saisissons, c'est nous-mêmes battant la campagne, enfilant des phrases, peut-être au sujet de notre effort (puis de son échec), mais des phrases et dans l'impuissance à saisir autre chose." (p. 27) 



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